"Maman, quand je serai grande, je serai pute !"
Parmi les sociétés de chasseurs-cueilleurs proches du paléolithique qui survivent aujourd'hui, on trouve les bushmen et les pygmées où les rapports homme/femme sont empreints d'une grande douceur. Dans les sociétés de Terre de Feu, en revanche, la domination des hommes sur les femmes a pu être d'une grande brutalité.
Dans les peuples de chasseurs-cueilleurs, il n'y a pas de prostitution mais il y a des exemples de liberté sexuelle. Des "femmes libres", donc "sauvages", qui n'appartiennent pas à un homme en particulier.
C'est un principe traditionnel, une femme qui n'est pas "protégée" par un homme "appartient" à tous.
Il faut arrêter de dire que la prostitution est "le plus vieux métier du monde". Comme si une mère pouvait dire à sa fille : "quand tu seras grande, tu pourras devenir PDG, infirmière, conductrice de bus, prostituée, ..."
La prostitution commence avec "l'existence d'une masse monétaire, des systèmes de production plus organisés." C'est à partir des chantiers de construction des pyramides que l'on trouve la trace des "filles de joie" dans les papyrus égyptiens. La prostitution commence avec le paiement.
Pour justifier la prostitution, certains affirment que la libido masculine est incontrôlable, alors que la libido féminine serait bien plus facile à contrôler. Ce sont bien évidemment des hommes qui ont dit cela, rien n'a jamais été prouvé !
Au Moyen Age, les prostituées sont "des filles perdues", "un mal nécessaire", l'Eglise condamne et ferme les yeux. La conception de la sexualité masculine est qu'il s'agit de "besoin légitime et irrépressible" : la prostituée soulage les maris frustrés et initie les jeunes gens. Les "maisons" sont en bordure des villes, d'où le terme de "bordel".
En 1836, dans "De la prostitution dans la ville de Paris", le Dr Parent-Duchâtelet livre la première enquête sociologique sur ce sujet. Il interroge les femmes. Il est médecin mais se fait accompagner par un policier pour les échanges. Il a le souci de les entendre et les comprendre. Il éprouve une certaine pitié et démythifie la fonction des prostituées : "elles n'ont pas le choix. Elles n'éprouvent pas de plaisir dans leur "métier". Elles se laissent parfois faire un enfant et s'en occupent très bien. Certaines se prostituent sur une période de leur vie puis se marient."
En 1835, on comptait à Paris environ 12 000 prostituées pour une population de 800 000 personnes. Les "maisons closes" sont apparues.
On trouve peu de points de vue de femmes sur la prostitution, à part ceux des féministes. Ces dernières ont souvent adopté à l'égard des prostituées l'attitude de grandes sœurs : "ce sont nos sœurs, des victimes, comme nous."
(source : Michèle Perrot, historienne et spécialiste de l'histoire des Femmes)
En France, en 1946, c'est la fermeture des maisons closes. "Dans une France libérée, où la femme est libérée, il n'est plus tolérable que l'on vende le corps des femmes." C'est la loi Marthe Richard.
Marthe Richard (photo Herodote.net)
Marthe Richard a été prostituée à 16 ans. Elle s'est mariée à un riche industriel. Elle est l'une des premières femmes en France à acquérir un brevet de pilote. Elle dit avoir fait de l'espionnage au service de la France pendant la Grande Guerre. Conseillère municipale de Paris à la Libération en 1945, elle accède enfin à la respectabilité et peut imposer sa loi aux députés et à l'opinion publique.
La suite au prochain épisode, j'y reviens très bientôt !!