Quand aimer tue.
Fait divers : un homme et une femme se disputent violemment suite au sms qu'elle a reçu de son ex-mari. Une vingtaine de coups dont quatre au visage, d'après les légistes. Elle sombre dans le coma et décède quelques jours plus tard.
Violences conjugales d'un couple ordinaire ou crime passionnel d'un couple exceptionnel ?
Deux façons d'interpréter ce drame qui lia Marie Trintignant et Bertrand Cantat dans la mort. Enfin, sa mort, à elle. Lui a été condamné à huit ans de prison, mis en liberté conditionnelle au bout de quatre ans environ. Il a été, un temps, le symbole des violences conjugales.
Selon une note de la Direction centrale de la police judiciaire, les crimes dits passionnels représentent les deux tiers des affaires d'homicides (France, 2009) et les femmes victimes sont tuées à 85 % d'entre elles par leur mari ou partenaire.
Selon une étude relative à 377 affaires de crimes dits passionnels, les femmes ne sont que 22 % à être les auteurs de ces crimes, contre 78 % des hommes. Elles font également moins de victimes que les hommes, qui ont plus souvent le souhait de voir disparaître leurs enfants également, avant de se suicider eux-mêmes dans un cas sur cinq.
D'après Etienne de Greeff, qui parle de jalousie par "cécité affective", ces hommes réduisent leur femme à "un objet, une propriété, une chose qui se met à leur merci et à leur usage" et ils sont amenés au meurtre "par exercice de leur droit de propriété".
D'après Patricia Mercader, Annik Houel et Helga Sobota ("Le crime dit passionnel : le paradoxe d'une violence supposée normale"), "le crime dit passionnel est un phénomène asymétrique qui doit s'analyser d'abord comme comme crime sexiste ou comme effet du sexisme." C'est en effet la menace d'être quitté ou la jalousie qui incitent les hommes à passer à l'acte du "fémicide".
Les motivations du passage à l'acte violent par les femmes sont majoritairement les violences conjugales, d'après les auteurs.
D'après les auteurs, "les couples auxquels nous avons affaire sont bien particuliers, puisqu'ils n'ont pas su divorcer à temps."
On a avancé, on n'est plus à l'époque où il était considéré comme "normal" de battre sa femme. Oui, normal, sain et plaisant pour elle. Rappelez-vous, la célèbre réplique d'un texte de Molière : "Et s'il me plaît, à moi, d'être battue !"
À partir du XVIIIème siècle, elles sont plus nombreuses à oser porter plainte. Le divorce n'existe pas mais les femmes peuvent obtenir une "séparation de corps" auprès des juges.
Lentement, on s'est mis à penser qu'une femme avait le droit de ne pas être battue...
150 femmes meurent chaque année en France sous les coups de leur compagnon.
Seule une femme sur dix porte plainte pour des violences conjugales.
50 % d'entre elles abandonnent leur plainte en cours de route sous la pression ou la force de la peur.