La chasse aux Sorcières : cruelle réalité historique...
Vous le savez, j'ai une tendresse particulière pour les sorcières...
Entre le XIVè et le XVIIIè siècle, plus de trente mille femmes ont été exécutées en tant que sorcières.
Maria, 10 ans, meurt dans les flammes du bûcher comme sa mère et sa soeur. Veronica Ziegler, mère de 7 enfants, a été exécutée en 1586. Margareth Mewel a été la première à être condamnée en 1582. Quarante-trois femmes ont péri à l'issue de procès délirants à Bergheim (Haut-Rhin). Un musée local retrace leur histoire. On est bien loin de Charmed ou Ma sorcière bien-aimée.
Pendant le Moyen Âge, la figure de la sorcière, dotée de pouvoirs occultes, existait déjà.
En 906, le canon Episcopi (ensemble de directives) envoyé aux évêques, condamne celles qui se mêlent de sorcellerie mais suggère seulement une mise au ban de la société. Ces femmes soignent les animaux dans les campagnes à l'aide de tisanes et de formules. On fait appel à elles et on les craint parfois, mais personne n'irait penser à leur faire du mal. Elles sont là pour les accouchements. On leur demande de l'aide pour les avortements de toutes jeunes filles, mais aussi de femmes trop âgées et ayant déjà trop d'enfants à nourrir... Elles sont herboristes et guérisseuses.
En 1318, le pape Jean XXII crée le "délit de sorcellerie"... Il pense avoir été victime d'envoûtement et de tentative d'empoisonnement par l'évêque de Cahors qui sera brûlé en 1317. Le pape Jean XXII se lance dans une croisade personnelle contre la sorcellerie. C'est le point de départ vers la folie collective.
En 1486, un ouvrage fournit le mode d'emploi pour démasquer les sorcières : Malleus Maleficarum rédigé par Heinrich Kramer. Il considère que les femmes sont plus susceptibles de pratiquer la sorcellerie parce qu'elles sont "crédules, impressionnables, excessives, bavardes, déficientes moralement et physiquement".
La population va se régaler dans les délations... Les maladies, les coups de gel sur les cultures, la foudre, les morts subites de nourrissons, vont avoir une seule cause : la sorcellerie. Les motivations des dénonciations virent au sordide. Une femme jalouse accuse sa rivale, un homme accuse une femme qui l'a repoussé, des villageois accusent une riche citadine, ... Les biens de la sorcière sont vendus aux enchères après sa mort : quelle aubaine !
En Europe, 75 000 procès pour sorcellerie se sont tenus en 3 siècles de répression suivis de 30 000 à 50 000 exécutions. Aux Etas-Unis, le célèbre procès des sorcières de Salem a entraîné l'exécution de 22 personnes dont 16 femmes, les autres étant mortes en détention.
Parmi les indices qui menaient au bûcher :
- le poids : on pesait la suspecte, les sorcières étant réputées très légères pour pouvoir voler.
- les marques du diable : on rasait l'accusée pour chercher sur son corps les "marques", tâches, cicatrices, verrues, formes étranges, ... quand on cherche, on trouve !
- l'épreuve de la nage : attachée pieds et mains liés, si elle flottait, elle était coupable. Si elle coulait, elle était innocente. Mais morte !
- les yeux : les sorcières étaient réputées ne pas pleurer, on cherchait sous leurs yeux des larmes.
- la protection du diable : on pendait la suspecte par les poignets, avec des poids attachés aux chevilles. Si elle n'avouait pas, elle ne souffrait pas, donc le diable l'avait envoûtée.
- le supplice de l'eau : on forçait l'accusée, attachée, à boire 12 litres d'eau avec un entonnoir.
- les membres brisés, les ongles arrachés, les entrailles ouvertes, la peau lacérée, l'acharnement n'a pas de limite. Elles sont réputées pour avoir le cuir dur, les sorcières...
Si elles n'avouent pas, c'est que le diable leur interdit de le faire. Le piège est sans issue... Elles finissent toutes par avouer n'importe quoi pour faire cesser les tortures. Les récits sont hallucinants. Une sage-femme "avoue" avoir "déterré des cadavres d'enfants pour les manger avec son amant le diable, ils se servaient des petits os pour faire surgir la grêle"... La plupart avouent "se déplacer sur une fourche avec le diable", "forniquer avec lui et des démons incubes (mâles) et succubes (femelles)".
Elles étaient très rarement innocentées.
Il faudra attendre la fin du XVIIè pour que soit terminée la chasse aux sorcières. En 1682, Louis XIV signe un édit royal qui déclare la sorcellerie "irréelle et inventée". L'hallucination collective est terminée.
Il restera quelques flambées tardives, notamment en Pologne, en Bavière ou même en Suisse. La dernière victime est morte en 1782 en Suisse. Elle sera réhabilitée au XXè siècle. Les minutes de son procès montrent que cette pauvre servante a été victime de violences sexuelles de son employeur, mais ce notable, médecin et malheureusement juge au tribunal, s'est empressé de la faire condamner...
(source principale : "Ça m'intéresse")