Lettre à mon utérus
Mais jusqu'où ira-t-elle ? se sont demandés certains lecteurs, au début de mes lettres à mon puzzle de moi...
Et bien... Loin ! C'est pourquoi aujourd'hui, je t'écris à toi, mon utérus.
J'avertis les internautes que c'est pour lecteurs avertis... blablabla etc...
Bon, bah... Voilà, quoi !
Mon cher Utérus,
Comme toutes les filles, je t'ai découvert dans mon manuel de biologie de collège. Tu es celui qui accueille l'enfant à naître. J'ai bien pris conscience de ton importance quand j'ai été enceinte. Les fameux traits bleus dans la petite fenêtre du bâtonnet sur lequel on a uriné. Mes 2h de voiture par jour, ma classe à gérer, les contractions que tu m'as imposées dès le troisième mois. Puis l'arrêt de travail, les longs mois à m'emmerder copieusement sur mon canapé... Les doigts gantés des blouses blanches pour vérifier la dilatation de ton col. Ni col Claudine ni col roulé, ma foi, mais col déjà dilaté à quelques mois... "Vous avez un utérus contractile, Madame"... Ah, merci, c'est la première fois qu'on me fait un tel compliment !
Qu'on ne vienne pas me bassiner avec l'épanouissement de la femme enceinte. Baleine échouée, vautrée, frustrée de devoir abandonner ses élèves trop tôt. Je vous fais grâce de la façon dont s'est déroulé mon accouchement.
J'ai quand même eu le courage d'en faire un deuxième. Re-belote. Grossesse alitée. Couloir bleu pâle du SIG. Soins Intensifs Grossesse. Rupture de la poche des eaux à 7 mois. Couveuse. Grande-prématurité.
Tu m'as bien fichu la trouille, cette année, avec ce papillomavirus. La menace du cancer du col de l'utérus a lourdement plané pendant des mois. J'en parlais ici, dans "La préférence masculine" : CLIC http://girlydivorce.canalblog.com/archives/2018/05/31/36449364.html
Le corps parle (il me doit bien ça, depuis le temps que je lui parle). Ma gynéco me l'a confirmé. Toi, mon utérus, tu as dû vouloir me mettre en garde : "il" me faisait plus de mal que de bien...
Mais dis-donc, mon utérus, en dehors de foutre le bordel dans mon être, tu fais quoi, toi, dans la vie ?
Pour Freud, tu ne sers à rien dans la sexualité. Lui, il est resté penché sur le clitoris et le vagin. Basique, comme la plupart des sexologues. C'est avec Françoise Dolto, en 1982 (La sexualité féminine), que tu as commencé à faire parler de toi. Et pas seulement pour la conception ou le cancer. Pour elle, c'est de toi que dépend l'orgasme. Elle ne renie pas le fait que tes petits camarades, le clitoris et le vagin, jouent un rôle important dans le plaisir et l'union des énergies sexuelles, mais affirme que c'est toi, l'utérus, qui déclenches l'orgasme par la résonnance que provoquent les mouvements (du pénis ou autre) contre ton col. Ce sont ces heurts et les vibrations qu'ils provoquent dans tout le corps qui vont permettre de "ressentir l'énergie masculine dans toutes les cellules" de notre corps de femme ou de "voir les étoiles".
D'après Dolto, la seule chose qui signale que certaines femmes ont un utérus mobile, c'est qu'elles ont "les mêmes besoins sexuels que les hommes". "Elles sollicitent autant les hommes qu'eux, alors que lorsque leur utérus s'est immobilisé à l'âge oedipien, c'est toujours l'homme qui en redemande et jamais elles."
Comment terminer cette lettre à toi, mon utérus ?
Je n'ai pas peur des mots, moi, mais avoue que ce n'est pas évident, de t'écrire. Tu résonnes étrangement, tu sais, mon ut est russe. J'ai appris à jouer de ta musicalité dans un duo pour concertistes avertis.
Bonne continuation à toi, mon utérus, on s'appelle et on trinque, un de ces jours... ?
Na zdarovié !
(Je sens que je vais encore perdre des lectrices, mais je m'en balance, si je peux en avoir éclairé ou amusé quelques-unes...)